Lynn

Mots pour Maux.

Lundi 22 juillet 2013 à 13:45

      



     Un lieu inconnu en terre battue.

La journée a couté en mémoire, des maux lointains ont été soulevés ; c’était inattendu, c’était comme un abcès qu’on espérait plus gros. J’aurais pu laisser tomber quelques poids, j’aurais pu savourer l’instinct abolissant les fins de phrases. Mais les murs transpiraient de souvenirs qu’ils n’avaient jamais connus. Plus lourde & plus consciente qu’à mon arrivée, je resongeais à la dernière vulnérabilité de ces bribes. Je ressentais ces enclumes, leurs liens fragiles & pourtant si sûrs qui m’avaient piégée. Je te revois, il y a quatre mois de cela, éclater sur le trottoir les quelques morceaux qu’ils m’étaient rudes de recoller. Je te revois étendre au possible tout ce que ce que tu ne connais pas avant d’y cracher sans vergogne. Je ressens l’épée entre mes deux omoplates, comme la trahison accompagnant la pire des craintes.

En vérité, tu as souillé mon vécu. A tel point que je ne m’y sens plus, ce qui m’empêche de m’en tirer. On a tous nos batailles, tu as bousillée la mienne comme un fou rire dans le noir profond de tes yeux, me vidant de ce qui me laissait si vive. Tu m’as vidée, oui, tu m’as vidée de ma vie. Je t’ai tout donné, tu as tout pris, puis tout salopé. Car si ces bribes constituaient une vulnérabilité inédite, elles amorçaient ma plus grande crainte.

Ce soir sur les terres de ces souvenirs, je pensais m’être relevée du pire. Erreur. Le sentiment de retour à la case départ, des paquets de nœuds aux chevilles, l’impropriété. Je me souviens l’été dernier, j’oublie rapidement l’idée de mesurer l’ampleur de la chute. Je me souviens avoir pris la fuite, avoir quitté ces terres, ces visages, pour te suivre & goûter un sentiment de liberté que nul ne m’avait jamais procuré. Ca allait, vraiment.

Il m’est toujours difficile d’admettre que c’est Toi l’auteur de l’irréparable. J’oscille. Comme si l’emblème de douceur que j’avais connue avait laissé place à un monstre. Comme si quelque chose avait déraillé. & quand je cesse de te prêter ce genre d’entourloupe, je ne peux que me demander ce que j’ai pu faire pour que tu te comportes de la sorte. Alors oui parfois tu manques ; par notre insouciance, par mon progrès, par notre vision, bref par toutes ces choses qui ont fini par me péter à la gueule, mais qui me faisaient tant de bien avant la décadence. Tu manques, mais la plaie de ta flingueuse résurrection me rappelle que tu n’existe plus.

Quelqu’un a pris ton corps, j’en suis aussi sûre & amère qu’une odeur de deuil.



 

Lynn.L

Lundi 7 janvier 2013 à 0:56

 

 

 


         

          L’illisible, encore & encore. Les maux se jetaient involontairement sous mes paupières. Vous voulez que je le sache, ou plutôt que je sache que vous le savez. Que vous constatez, que vous ne comprenez. Sans doute bien pensants, sans doute bienveillant, nulle intention intrusive. Bien. Merci, c’est gentil. Tant pis.

  

 

De l’aube il faut prendre du bon, du bien. Je la prends surtout tard, mais sans ignorer ses lueurs. Je m’entête, question d’habitude, dans son sens. Je déploie chaque jour les mêmes sons, ceux grâce auxquels tu as prétendu ne pas pleurer. Il n’y a pas d’ailes, mais ton esquisse saturée dans le cœur. Comment être aussi sûre de ça ? Journées chêvrement inutiles, bientôt bâclées. Je suis trop obnubilée, pompes & forces errent en toi. Te donner raison, voire tout. Tout n’est que confrontation, jusqu’à ton retour. Vide maintenant, creux prochain – vide, débordant, hurlant, soupirant, aimant ?

 

 

          C’est pourquoi ça flanche lorsque des pièces jointes se désolent. Les unes après les autres il ne faudrait ni trop parler, ni mentir & éviter les soupirs, mais entretenir. Rester sur son 31, il paraît qu’on jouait bien. Jouons la vie.

Ca flanche, comme pour ta Rose. & il fait bien frais.





 

 

Lynn.L

Vendredi 23 septembre 2011 à 21:30

[Giovedi.]      






      C’est ce que j’en ai tiré.

A cracher des mots dans le but d’ouvrir une paire d’yeux, j’ai crevé les miens. Sans détour, les sons se sont éclatés dans l’air, sur le trottoir, & dans ma gorge. Face à une tête à claques, au beau milieu de la masse ingrate, je n’ai pas eu le temps de rattraper mes organes. Je n’étais pas la mieux placée pour démontrer cette morale, du tout ; Si mon filage se révéla un échec manifeste vis-à-vis de sa cible, je l’ai rabattu sur moi.

« C’est là qu’est le paradoxe
 : à partir de là, je n’ai plus cherché à comprendre où j’allais, ce qu’il se passerait. Parce que dans ma tête tout ne pouvait que bien se passer. »

      Reprendre, tenir les images du bout des doigts, & tenter de les balancer loin au moment où d’autres resurgissent. Changements de décors. Celui de multiples naissances, celui d’hebdomadaires bouffées. Abstraire. De l’envie, du regard, des souffles, des échos. Exclure les sens. Oublier ses propres mains, ses propres parcelles alors qu’elles s’étalent sous nos pieds & sur nos entrailles de fruits en fuites. Avaler des pépins, en s’efforçant de ne rien semer ; s’essouffler en noyant ses poumons d’une eau infiltrée, & goûter encore.



 

 

Lynn.L

Jeudi 14 juillet 2011 à 19:27

 

 

      Chaque jour. Pas un sans y songer.
Un mot, un geste, une expression, un objet, un lieu. N’importe quoi. Tout peut m'y ramener. Tout ce qui fait mon quotidien me renvoi à celui qui était devenu notre. 
Nous passions notre temps à nous raconter tant de choses, à marcher ensemble. Il était devenu naturel pour moi d’envisager la répercussion de chacune de mes actions - Tu n’aimerais pas son attitude, tu passerais ta main dans tes cheveux, tu ronchonnerais en silence. OK. Les jambes croisées, la paume sur le menton. D'accord. Ta hanche, un sourire. Ce sourire.

 

 

Le soir est vicieux, tout comme la nuit. Tout comme toi. Il est de mèche avec cette obscurité que je peine à dompter sans toi. Il me ment, me pousse à croire que tu es là pour apaiser mes peurs ; & parfois, j’ai l’impression que ça n’est plus le noir qui m’étouffe, mais le vide. Celui de la seule sécurité qu’il me restait, le vide que je n’ai pas le droit d’imaginer comblé.

 

 

      Des habitudes. Le souffle mort dans le bus, l’éternelle annonce au bas de la fenêtre, les chaussures en proie à de redoutables créatures, la cuisine sous ta direction, les petits plats improvisés, le lit cagibis, la petiote terrible, la guerre du pipi-room & l’attaque des alliés petits momains, l’acidité de l’eau, le deuil du rideau de douche, les fringues mêlées & uniformes.
Je cours toujours après les bus, mais plus jamais à ces arrêts, plus jamais avec cette impatience ou cette bulle rêvasseuse. Un rythme a été instauré contre ma porte d’entrée, un code déjà moins commercial qu’un prénom répété inlassablement à l’issue d’une course folle. J’ai appris à planquer mes godasses depuis une semaine, depuis que le chiot a manifesté une tendance au chewin gum. Je perds toujours le contrôle dans une cuisine autre que la mienne, j’ai d’ailleurs cessé de coopérer dans la plupart des cas, sans plaisir. Je crise si la salade n’est pas coupée ou sans citron, je réussis mes pattes mais préfère le souvenir d’une pizza ; manger mexicain ou faire du guacamol est devenu un véritable mémorial, autant que des frites maisons ou encore la soupe. Le lit est grand, froid ; il a un sommier, quarante couettes, cinquante coussins & il manque d’accroche, ce con. Je fuis toujours les enfants, leurs tristesses me rappellent la fameuse moue de miss Franklin-Barbapapa, trop semblable à la tienne. Me brosser les dents n’est pas aussi drôle sans dissimuler une grimace, & il m’arrive parfois de prendre ma douche assise, sans la surveillance malsaine du baigneur. La nuit, j’allume la lumière pour traverser mon couloir, des fois que les jouets du chien soient de ton côté & me fassent une crasse, qui sait. Les vêtements au sol sont uniformes, mais je ne me précipite plus en enfilant dix tailles en dessous, ils sont tous à moi, tous…

Je pourrais passer ma nuit, & peut-être même plus, à énumérer d’autres parcelles de ces trop courts quotidiens à tes côtés. Seulement j’aimerais bousiller ces automatismes, tu vois, afin de ne plus me souvenir comment est-ce que j’ai pu m’en priver. Mais il semblerait que je ne sois pas la seule à les trouver si bons, si précieux, & que là-haut aussi, c’est curieusement envieux de voir ce qu’il serait venu, après, à nous deux.




Lynn.L

Jeudi 14 juillet 2011 à 19:21

[2009. Une nuit de Décembre.]



      Je reste dans l’incapacité de donner du sens à ma récente peine qui me pousse aux nerfs depuis quelques soirs ; seules les causes restent claires, livides, limpides, bien trop limpides. 
Le manque me prend. Il me tient, me sert bien fort contre lui, alors que d’ordinaire il me boude, me touche du bout des doigts & me révèle lassante. Je ne lui ai jamais plu, je crois. Pourtant, les images, les souvenirs, les regrets qui ne cessent de flotter ont fini par attiser ses foudres. Il a suffi que ce nombre, un rien de saloprie, vienne s’afficher  & se réfléchir  en l’éternel compteur pour que BSB trébuche.

Ecrire ton nom m’est difficile. Tu me manques atrocement. Nos photos, nos souvenirs, ces instants qui n’ont jamais appartenus qu’à nous ne peuvent m’effleurer sans craintes. Tu es là, je le sais, autant que nos liens. Jamais je ne le croirai.
J’éprouve ce lourd besoin. Tout te dire, partager le bon, le mauvais. T’entendre me dire que tout ira bien, alors que nous avons toujours trop su que la façade était trop belle. Je m’en suis toujours voulu ; Ne pas croire à l’espoir inespéré auquel tu aspirais  n’a-t-il  pas été la plus grande des fautes ? Tu sais, Je ne t’ai jamais reproché  ce que j’ai toujours deviné : l’espoir restreint que nous possédions l’un & l’autre  ne s’est qu’involontairement niché en nous, avec tout le vice destructeur qui nous rodait. Sans doute l’as-tu entendu, on a toujours pensé trop fort.
Je revois nos mensonges en guise d’efforts, L’amour qui n’a toujours été que le premier présent. Je te revois, toi, ton corps, au sol, meurtri. Je n’ai pas perdu qu’un lien. J’ai perdu mon double, je me suis perdue moi, encore au-delà des frontières effacées. Nos racines sont les mêmes, ma vie a décrochée. Dans l’épaisseur de la neige, le temps n’effacera pas les pas que nous avions partagés, ils dorment là où nuls autres que nous ne peuvent les voir, les retracer. Mais on t’a volé, tes coups acharnés, les nuits atroces, ton supplice, l’ont emporté. Forcé à l’abandon, sans protection mutuelle, sans fusion sensible.

Je ne suis décidemment qu’une égoïste, je le sais bien mieux à ce jour que jamais. Je ne détiens pas le droit de souhaiter, rêver te voir surgir de nul part, vaillant, magnifique, heureux, vivant, de t’imaginer te poser sur moi, de toute ta délicatesse caractéristique à mon égard. Interdit est ton corps contre le mien, comme une promesse qui nous colle à la peau. Du silence, comme celui que je dois depuis garder, dans la plus grande transparence. Non, je le répète, je ne dois pas le penser, je l’écrirai juste.


      A la beauté de ta personne, au temps des cendres, à l’injustice que je brûlerai pour nous, à la rage qui prendra place, à la rancune qui trône ; tu resteras l’être & la part magnifique, le semblable dont nul ne peut rêver, celui que je tais aux rires pour mieux préserver en empire. A cet amour, qui est parti avec plus que lui-même, mais moins que tous ces souvenirs. B.






Lynn.L

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